L’assistance humanitaire qu’apporte le Programme alimentaire mondial (PAM) aux personnes affectées par la crise sécuritaire et déplacées ainsi qu’aux communautés d’accueil dans le Nord du Bénin impacte non seulement les ménages bénéficiaires directs de l’appui mais aussi l’économie locale dans ces localités hôtes via des groupements de femmes qui en tirent profit avec toute leur famille. Le cas du département de l’Atacora.

Tôt ce matin du mercredi 07 mai 2025, sur la cour de l’arrondissement de Perma dans la commune de Natitingou. Des hommes, des femmes enceintes et des femmes allaitantes, bébé au dos, sont venus déjà nombreux des villages de Perma et de Tchoumi-Tchoumi. « Je suis venue ici pour qu’on m’aide pour les problèmes d’alimentation », indique Adoubairou Ramattra mère de 5 enfants. « Le PAM nous donne de l’argent pour manger.», précise Idrissou Oumarou. Ils sont des demandeurs d’asile, personnes déplacées internes et familles hôtes que le Programme alimentaire mondial (PAM) appuie face à la crise sécuritaire. Ce site couvre 22 ménages de Perma et 93 de Tchoumi-Tchoumi.
Il s’agit de l’assistance d‘urgence aux personnes affectées par la crise sécuritaire venues du Burkina Faso et des déplacées internes, fait savoir Calixte Dassey Capo, chargé du genre et de la protection au Bureau du PAM à Cotonou. « Nous avons des montants de transfert en fonction des personnes puisque c’est une enquête qui a été faite et les paramètres ont été retenus avec le Gouvernement et les partenaires pour déterminer les besoins alimentaires du ménage et le montant. Les chefs de ménage reçoivent une assistance de 40.000 F par mois au nom du ménage sur trois mois de distribution. La femme enceinte ou allaitante du couple qui a été accueillie reçoit 16.000 F et son enfant 2.500 F sur la même période. Les femmes enceintes et les femmes allaitantes qui sont de la communauté hôte, c’est-à-dire, de la communauté d’accueil, reçoivent une assistance de 12.000F. Cela permet de prendre en compte à la fois les personnes les plus vulnérables au niveau des communautés en déplacement et aussi au sein des communautés hôtes. », explique-t-il.

Ce mercredi à Perma, les bénéficiaires témoignent de l’utilité de cet appui qui leur permet de subvenir aux besoins alimentaires de leurs ménages respectifs. « Ça fait deux fois déjà que j’en ai pris. Je vais payer du riz et du maïs. Sinon, sans cet argent, c’est difficile de nourrir la femme et les enfants », affirme Idrissou Oumarou. « Cela nous aide pour notre alimentation et pour notre santé. J’avais acheté à manger mais pour la troisième fois, j’ai pris une partie pour acheter du mouton pour l’élever. Nous remercions beaucoup le PAM. C’est la joie. », dira Adoubairou Ramattra qui a en a bénéficié déjà trois fois.

La nutrition au cœur de l’action
L’objectif pour le PAM, c’est de s’assurer de la sécurité alimentaire et nutritionnelle de ces communautés. « Le PAM, c’est d’abord la lutte contre la faim. Au PAM, la porte d’entrée de l’urgence, c’est la nutrition ; c’est un paquet qui intègre aussi le volet communautaire », affirme Calixte Dassey Capo. « L’assistance que nous apportons aux communautés, c’est pour leur permettre de satisfaire les besoins essentiels du ménage ; et parmi ces besoins, il y a la bonne alimentation équilibrée des membres du ménage. Nous souhaitons une bonne alimentation et une bonne croissance des enfants ; mettre fin à la malnutrition et améliorer l’éducation nutritionnelle des mères. », renchérit sa collègue Colette Boundé, Assistante au Programme, chargée de la préparation et réponse à l’urgence au niveau de l’antenne du PAM à Natitingou, dans le département de l’Atacora où sévit la malnutrition.

Dans ce paquet d’assistance d’urgence, le PAM, en amont du transfert monétaire, fait des sensibilisations pour un changement de comportement, des visites à domicile, des démonstrations culinaires, des conseils nutritionnels, des causeries éducatives, etc. Il y a particulièrement un volet lié à la production de farine enrichie à base de denrées localement disponibles notamment le maïs, sorgho, mil et soja. « Il y a des femmes qui ont été formées dans la communauté et produisent des farines enrichies de façon que sur certains sites de distribution, le chef de ménage ou son épouse qui a pris l’assistance puisse se procurer de ces denrées afin d’améliorer l’alimentation de l’enfant et de la femme allaitante ou enceinte », rapporte Calixte Dassey Capo.
Plusieurs groupements de femmes ont été formés et suivis par le PAM pour produire ces farines enrichies. Ils reçoivent aussi des équipements à cet effet. « Nous avons fait des formations sur les bonnes techniques de production de la farine enrichie qui joue un double rôle dans leur vie. D’une part, pour des besoins alimentaires nutritionnels au profit des enfants en bas-âge et des femmes elles-mêmes en tant que membre du ménage. D’autre part, pour des raisons économiques puisque cette farine est revendue et crée ainsi des revenus au profit du ménage pour la satisfaction des différents besoins des membres. On a formé aussi ces groupements sur la vie associative. », confirme Colette Boundé.
Sousominan, un modèle

Le groupement Sousominan est l’un des bénéficiaires. Sousominan produit de la farine Biboualafia de maïs, sorgho, mil et soja. Ce groupement a été créé depuis 7 ans. Les communautés assistées par le PAM constituent désormais un de ses marchés. « Nous les avons redynamisées et essayé de mettre ces femmes en réseau avec d’autres des communautés déplacées qui avaient une méconnaissance de la qualité ou des bienfaits de cette farine. Cela a fait que ce groupement a vu son pouvoir de vente de la farine s’élargir », informe Colette Boundé.

Rencontrée le jeudi 9 mai 2025 sur leur site de production au sein du Centre de promotion social (CPS) de Péhounco, Massouratou Ousmane, membre de Sousominan, raconte que le PAM leur a donné plus de visibilité et leur a permis d’accéder à d’autres marchés pour mieux écouler la farine. « Avant l’arrivée du PAM, nous avons du mal à écouler notre farine. Ce sont juste quelques personnes qui viennent acheter. Avant, nous produisons en petite quantité, une bassine pour l’ensemble du maïs, sorgho, mil et soja. Mais avec l’arrivée du PAM, nous avons commencé par faire une bassine de maïs, une bassine de mil, une bassine de sorgho, une bassine de soja. Aujourd’hui, beaucoup de personnes sont informées que nous avons la farine enrichie et nous livrons jusqu’à Tchoumi-Tchoumi. Nous sommes allés jusqu’à Kérou pour la livraison. », fit-elle savoir.

Silifa Akanro, la trésorière du groupe, informe qu’à la dernière vente, elles ont enregistré un chiffre d’affaires de 300.000F pour un bénéfice de 90.000 F. Elles vendent aussi dans des hôpitaux, des pharmacies et auprès des commerçantes qui ont des boutiques. « Le PAM nous a permis d’élargir notre chiffre d’affaires et d’être connues même dans de petits villages. Ainsi, nous-mêmes, nous trouvons un peu d’économie pour prendre soin de nos petites familles. Après la distribution de Tchoumi-Tchoumi et de kérou, j’ai eu une partie de l’argent et j’ai pu acheter un mouton que je suis en train d’élever. Je veux commencer aussi l’élevage », se réjouit Massouratou Ousmane.
Elle attend impatiemment le renforcement de l’accompagnement du PAM pour plus de visibilité du groupement sur toute l’étendue du territoire national. « A ce stade, nos revenus vont s’augmenter », martèle la trésorière.